Friday, September 16, 2005

The Subways

Voilà, comme prévu j’ai fini le plus gros du manuel de cristallographie. Maintenant, deux chapitres d’expérimentation plutôt agréables à faire. Plus, si je m’en sens, la discographie expliquée des Narcisses. Ça, ce sera plus dur puisqu’il faudra écrire les paroles des chansons des Narcisses. J’essaierai, pour voir. J’ai déjà les titres, souvent, j’ai déjà les thèmes. A moi d’arriver à broder des paroles qui tiennent la route et des poèmes qui pourraient se chanter. Lundi, je retourne aux études. Je me demande à quoi ça ressemblera. A la même chose que toutes ces années passer : décevant. Ce sera une lutte permanente contre moi-même pour ne pas rentrer dans le rang. Est-ce que j’y arriverai ? Il faut que je continue à occuper mon temps en écrivain, en lisant, en commençant un autre roman, en terminant celui-ci. Ne pas parler aux autres. Ne même pas chercher à les connaître. Passons aux choses sérieuses :




Garden State de Zach Braff



Parce que ce n’est pas parce que je n’ai pas blogué pendant des mois que je dois passer sous silence les énormes découvertes qui s’y sont déroulées. J’espère simplement qu’avec la mémoire qu’il m’en reste, je saurai leur rendre justice. Garden State, je l’ai vu 3 fois, et la première fois, je me trouvais à Strasbourg, tout seul pour y fêter le bon déroulement de ma première semaine de travail. J’avais prévu d’aller au cinéma là-bas pour voir des films pas encore disponible chez moi. Garden State en faisait parti, je l’ai vu à 14 heures, dans une petite salle pas pleine. Pas où commencer ? Parce qu’en évoquant des souvenirs comme je viens de le faire, vous vous doutez bien que j’essai de me défiler. Sur ce film, j’ai déjà tout dit, il n’y a rien à rajouter. Ce film, c’est tous mes rêves, toutes mes envies et mes souvenirs, mes moments ratés et mes fantasmes. Ce que j’expose sur ce blog. Ce serait difficile d’épiloguer dessus comme je l’ai fait pour Broken Flowers parce que Garden State, ce n’est ni un film, ni la vie. C’est un de ces rêves que l’on fait sciemment, le matin quand on décide de rester au lit sans pour autant arriver à se rendormir. Je veux dire par là que c’est l’histoire idéale, que c’est drôle, fragile, ça nous caresse dans le sens du poil et toujours on y rajoute une touche tragique pour mieux s’en rappeler la beauté. Il faut bien commencer par quelque chose : Garden State, c’est l’histoire de Andrew Largeman, aspirant comédien raté, qui retourne dans sa ville natale pour l’enterrement de sa mère. Là vas, il retrouve les origines de sa névrose en même temps qu’il rencontre sa cure : Samantha, LA jeune fille. Celle qu’on imagine tous : drôle, délurée, talentueuse, sentimentale, gaffeuse, sérieuse, cultivée ( les vinyles qu’elle passe dans sa chambre en sont l’exemple).



Je rassure tout le monde : Sam est un personnage de fiction, bien plus que la Reine Amydala jouée par la même Nathalie Portman dans Star Wars (que je n’ai pas vu soit dit en passant). Andrew et Sam se rencontrent fortuitement, se parlent, et tout se déroulent comme ça devrait, doucement, normalement. A aucun moment on entre dans la caricature hollywoodienne : quand Andrew se lève le lendemain de sa rencontre, elle n’est pas dans son lit ; ils ne s’embrassent pas immédiatement ; ils ne se disent pas je t’aime à tout bout de phrase. Andrew rencontre la famille de Sam le plus naturellement possible (et ils sont tous aussi géniaux que Sam) et elle et lui parlent ensemble, se fréquentent, évoquent leur souvenir, comme des amis. On ne sent pas l’attirance sexuelle, on ne sent pas l’hypocrisie qui s’installe quand on drague quelqu’un. Sans doute que dans le vraie vie, Sam aurait dit à Andrew : « Je préfère qu’on reste ensemble », mais dans la vraie vie, ni l’un ni l’autre n’existe, alors on s’en fout. Je pourrai épiloguer longuement, faire une liste de tous les moments magiques du film, de chaque fragments d’image qui rappelle tous le reste, un peu comme les carrés qui composent l’affiche du film. Titembé. Sam dans la piscine. L’abyme infinie. La fête le premier soir. Le restaurant où travaille Andrew. Le tout premier rire de Sam alors qu’elle écoute les Shins en regardant Andrew. Le cimetière des animaux de Sam. Son épilepsie. Le velcro silencieux. Je pourrai continuer ainsi des pages et des pages à évoquer les détails de chaque photogramme : ça en voudrait le coup. Mais Garden State, c’est un film à voir, à expérimenter, et j’ai la très nette impression que de part sa simplicité, sa fluidité, il est sans fin, il est à voir et à revoir des milliards de fois, ce sera toujours meilleur. Pour finir sur quelque chose, j’aimerai revenir sur un détail qui occupe tous le film et qui, par rapport à mon mode de vie et à ma thématique, m’intrigue et titille. Tout au long de leur relation, des premiers mots jusqu’aux pleurs de joies de la fin, Sam et Andrew n’épiloguent pas, ils n’ont pas de long discours sur ce qu’ils aiment, ce qu’ils détestent, sur leurs goûts, leurs mode de vie, justement, ni de leurs films préférés ou de leurs ennemis. Quand Sam pose son casque qui diffuse les Shins dans les oreilles d’Andrew, c’est comme un accord tacite : voilà comment nous sommes. Point. C’est ça qui rend le film si fluide et si prenant, c’est ce qui lui donne son caractère de rêve éveillé. Après, il parleront de ce qu’ils font, ils commenteront, expliqueront en direct : le système des moments originaux, le cimetière des animaux, le dialogue de la piscine sur la famille. En quelque sorte, ils n’ont pas besoin de justifier , ce ne sont pas de vraies explications, c’est faux. Ils savent qui ils sont l’un par rapport à l’autre. Contrairement à mes personnages, ils ne rappellent pas continuellement le monde dans lequel ils vivent. Ils vivent tout simplement, ils peuvent se le permettrent. A cause des Shins, à cause du casque qui passe de crane en crane. Je ne sais pas quoi ajouter de plus, permettez moi de me citer moi-même pour conclure un questionnement qui ne finira jamais :





« - Ce que j’aimerai comprendre, dis-je, c’est la raison pour laquelle il est tombé amoureux d’elle ?
- Là dessus, j’ai mon idée, c’est assez simple.
- Puisque tu m’en as déjà tant dit, continue
- Ça tiens dans une anecdote. Elle remonte au moment où ils se sont rencontrés. Ils s’étaient rendu ensemble à une fête dans la maison de quelqu’un, et la musique était très mauvaise, et quand il chercha dans la collection de disque du propriétaire, il s’exclama : « Pas un seul bon disque. Même pas de quoi trouver ne serait-ce qu’une bonne chanson. » Il ajouta « Il ne doit pas y avoir une seule note jouée sincèrement sur un seul de ses disques ».
- Et alors, dis-je, m’impatientant, sentant mon excitation s’enfuir à cause de toutes ces explications
- Voilà l’intéressant : au lieu de lui répondre quelque chose du genre « Et alors ? Profite ! Eclate-toi ! », elle lui répondit « Oui, Je sais, c’est horrible »
- Je ne comprends pas.
- Un univers entier de possibilités s’ouvrit à lui, et c’était la première fois qu’il pouvait le pénétrer. Alors ils sont allés dans la voiture de Camille et ont ramené ses disques à elle. Ils ont piraté la soirée.
- Et c’est pour ça qu’il est devenu obsédé par elle ?
- Qu’est-ce que tu en sais ? Je ne t’ai jamais dit qu’il était obsédé par elle, je t’ai juste dit que c’était une part importante de lui. Et toi, pourquoi est-ce que tu es obsédé par lui ?
- Je ne suis pas obsédé
- Tu pose des tas de questions, elle insistait lourdement, tu veux tout savoir : tu es obsédé par lui.
- Parce que c’est la première fois, dis-je pour achever la conversation, comprenant enfin l’importance de l’anecdote. Ou peut-être que je faisais juste semblant ».

(dialogue entre Serge Nollens et Louise Champagne à propos du personnage de Camille Goemans, extraite du Manuel de Cristallographie)




Stradust Memories de Woody Allen

C’était un des derniers Woody qui me manquaient avec Bullets over Broadway et Maudite Aphrodite et sans aucun doute c’est le plus dur à trouver et sans aucune doute c’est un des meilleurs. J’ai du le commander en zone 1 parce qu’en plus d’être un de ses meilleurs, c’est un des plus imperméables. Pas d’histoire jolies à la Annie Hall, pas de snobisme à la Intérieurs (pour faire vite). Donc forcément, dur d’imaginer un public. Stardust Memories est le film le plus déconstruit de Woody Allen, et évidemment, comme c’est un bosseur, c’est bien sûr son film le plus construit, si on regarde bien l’envers du décor. Il emprunte beaucoup de choses à 8 et demi de Fellini (un film extraordinaire, tout comme la Dolce Vita, parmi les meilleurs au monde, à opposer très vite au Satiricon, bouse du même cinéaste), et il préfigure beaucoup du cinéma de 2005. Ça tombe d’ailleurs très bien que je le découvre à ce moment. Sandy Bates est un cinéaste, c’est le Woody Allen de société, l’image qu’il donne de lui, au moment où il va passer des comédies du début ( Guerre et Amour, Sleepers) aux films plus sérieux ( Manhattan, Intérieurs). Forcément, il est un peu perdu, forcément, le virage passe mal dans la tête des producteurs et sans doute, inconsciemment, dans sa tête à lui. Il part à un festival qui lui est consacré, il y rencontre une jeune femme maniaco-depressive qui va lui rappeler le souvenir d’une de ces ex, pendant que son actuelle, mature et intelligente, vient le rejoindre avec enfant et promesse d’union. Voilà à peu près, pour simplifier, l’intrigue, et en fait, c’est un de ces films les plus drôles. Parallèlement, c’est aussi une fourbi de souvenirs qui envahissent de plus en plus le film et le phagocyte jusqu’à ce qu’il en arrive même à devenir fiction.



Ça fait résonner dans nos oreilles des titres comme Eternal Sunshine, bien sûr. Et si les idées sont d’une très grande modernité, il est bien plus qu’un précurseur, parce que les films de Woody sont à part, ils suivent leur ligne propre. Dans celui-ci, c’est le désordre des souvenirs qui va nous faire glisser de plus en plus dans la nostalgie, parce que contrairement à Eternal Sunshine, il n’y a pas de voie inverse. La technologie ne l’a pas encore inventé. Pour compenser, Sandy Bates invente, il fait des films, c’est comme ça qu’on découvre sa relation avec le personnage de Charlotte Rampling et tout doucement, l’imagination de Sandy prend le dessus, il la revoit elle aussi, en même temps que ses souvenirs. Pour faire court, parce qu’il y a d’autres choses à dire, c’est un film de Woody Allen, qui parle de mort, de nostalgie, du sens de la vie, du manque de sens de la vie, d’humour, d’extra-terrestre, de cubisme, de maladie mentale, de déviances mentales, de sexe, de célébrité, du paradis du jazz, et d’expériences scientifique à but romantique. Pete Toswnsend a dit un jour que pour faire du rock, il ne fallait pas s’occuper d’originalité, il suffisait de prendre toute l’histoire du rock’n’roll, de la mettre dans un flingue et de tirer la cartouche. Voilà ce qu’est Stardust Memories pour le cinéma de Woody Allen.



Dans la liste des engrenages du passé, il me reste à parler de Chungking Express et de certaines choses qui sont arrivés à Strasbourg il y a quelques mois et qui prouvent que je suis Morrissey.

[AJOURS : un ami a ramené de New York le dvd de Garden State. Je suis le seul avec un lecteur dvd multizone]

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