Saturday, March 05, 2005

Iggy Pop – Tonight

Passons à l’évocation rapide de quelques souvenirs éphémères, puisqu’il sera difficile d’être loquace sur le futur gommé peu à peu. Même mon disque spécial David, Lou et Iggy ne semble plus marcher.

So.



Je prenais des cours de théâtre. C’était le dimanche. J’allais dormir sur place dès le samedi soir. Je partageais ma chambre avec une jeune fille. Son carré était aménagé à son goût, je me souviens de sacs, de livres et peut-être même une guitare. Nous dormions vite, comme Paul et Karen, chacun de son côté avec son petit lit, les paquetages à côté. Nous parlions à voix basse, c’était notre première rencontre. Le premier cours de théâtre serait demain. Elle me parlait de son inspiration et de ses motivations. Un filet de lumière filtrait par les volets. Elle s’endormait en murmurant. Tout doucement, sa couette glissait à terre, et découpé par les rayons je voyais son corps nu.





La salle de concert était un vieil entrepôt. La ville était loin. J’ai rencontré la fille longtemps après que les amplis ait été débranchés. Nous écoutions encore le premier album d’Interpol, diffusé par la sono de la salle. Nous étions seul à deux, le sol jonché de gobelets en plastique, de cigarettes encore fumantes et des programmes de la soirée. Je n’étais pas d’ici, et pourtant je m’y retrouvai mieux qu’elle. Elle avait peur de ne plus trouver la sortie, de s’écarter dans les dédales du complexe, c’est ainsi que tout a commencé. Elle m’a suivi, nous écoutions la toute fin d’Interpol. Nous parlions peu mais nous partagions beaucoup. Il fallait emprunter des escaliers dans le vide et diverses passerelles. Le chemin était dangereux. A un moment je lui tendais la main, elle prit quelques secondes, le temps de ne pas tomber, puis la refusa. En contrebas, une bande de racaille fumé en écoutant du rap sorti d’un autoradio. Tout de même assez vite, nous atteignons la sortie. Je veux lui demander son numéro de téléphone, son adresse e-mail, quelque chose. Elle ne me donne que son prénom et disparaît, perdue dans sa ville.





Elle est plus vieille que moi, au comptoir d’un lieu dont j’ai oublié tout sauf les insignifiant détails. Du vert, des dorures discrètes et défraîchies. Elle a cette peau assombrie que j’apprécie. Elle pleure. Je vais la voir. Ma bouche contre son épaule.

Toujours la même, à chaque fois. Comme en pleine nuit, un visage sous la pluie. Reproduire à jamais le même moment, car il ne se reproduira pas. L’étendre sur le temps, car il ne durera pas.


Je repense à mon disque cassé et ça m’énerve. Si on ne peut même pas compter sur la musique, à quoi bon ? Je me rattrape sur Antony and the Johnsons à la place.
La fille qui danse à 15 heures n’y était pas aujourd’hui.

« Esquisse pour Teardrops falling underground »
D’abord, on y jette ses souvenirs,
Viens la leçon, quand on veut les retrouver,
Ils sont déjà couverts de cette terre noire
Battue par les pelles.
Puis ce sont nos rêves,
Qui sont enterrés par la réalité
A la fin, quand il ne reste plus qu’un corps à cacher,
Dépassent
Nez, Genoux, Bras, Mains ;
Et tous se demandent :
Qui creuse ces tombes trop petites ?



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